
Le jeu vidéo c’était vraiment mieux avant ? Le retrogaming c’est l’avenir ?
Le jeu vidéo, c’était vraiment mieux avant ? Une question à laquelle pas mal de passionnés de retrogaming y répondront par l’affirmative. Car forcément quand tout était en pixel et qu’il y avait seulement deux boutons sur une manette, c’était beaucoup plus amusant. Un fait pour certains, mais qui n’est pas toujours la vérité des autres. Et pour ma part j’ai bien du mal à adhérer à cette vision, que je trouve même erronée par moment.
On pourrait penser que c’est une réflexion qui date de l’émergence du retrogaming et pourtant c’est loin d’être le cas. Je me souviens encore d’une discussion que j’ai capté en étant enfant, mais j’étais alors encore trop jeune pour en faire une analyse pertinente. C’était de l’époque de la Super Nintendo, donc je devais avoir vers les neuf ans. Je passais beaucoup de temps sur cette machine et pour moi c’était tout simplement ce qui se faisait de mieux. Ma vision était restreinte car bien entendu pour que ce soit meilleur il fallait que ce soit plus beau. Donc, quand j’entendais mes vieux oncles autour de moi parler des jeux qu’ils jouaient quelques années auparavant en disant que c’était plus amusant car plus simple, c’était sidérant et je me disais intérieurement qu’ils ne comprenaient rien.
Comment un jeu sur Atari 2600, avec un sous-marin qui envoie des projectiles carrés sur des bateaux, pouvait être plus amusant que mon Street Fighter II ou encore Super Mario World ?
Avec le recul des années, c’est une situation assez drôle et je me rends compte que ma pensée était assez étriquée. Quand on s’intéresse un peu aux fondements du jeu vidéo et à son histoire comme je le fais aujourd’hui, on s’aperçoit tout de suite que c’est une évolution naturelle, mais surtout générationnelle. J’ai la même discussion avec mon fils de dix ans aujourd’hui quand j’essaye de lui montrer un jeu de mon enfance. J’en viendrais presque à découvrir à travers ses yeux que Super Mario Bros sur NES, c’est flou et pas très beau.
La nostalgie créée par nos souvenirs est parfois trompeuse. C’est quelque chose dont je me suis aperçu au fil des années. Même si mes étagères sont pas mal remplies de vieux jeux vidéo, je n’aime pas me présenter en tant que collectionneur. Je n’achète pas un jeu pour le poser sur ma tablette et le voir prendre en valeur, mais parce que je sais que je vais avoir envie d’y jouer. Mais qu’on le veuille ou non, dès qu’on commence à toucher cette forme de mélancolie pour le jeu vidéo du bout des doigts, on est happé par l’engrenage et on tombe malgré nous dans un puits sans fond.
Dès ce moment là, on a vite envie de récupérer les jeux de notre enfance, qu’on a malheureusement perdu avec le temps. Souvent le désir de posséder l’objet relié à nos souvenirs est très tentant. L’objectif est de pouvoir y rejouer, voire de temps à autre de le faire découvrir à nos enfants. Avec l’espoir un peu secret de leur transmettre nos souvenirs ou notre passion. Mais peu importe la raison, la piqûre de la nostalgie est presque toujours ce qui nous motive à démarrer cette accumulation. Pourtant, lorsqu’on revient après plusieurs années sur certains de ces fameux jeux, l’évidence qui nous imprègne assez vite c’est qu’ils ont quelquefois mal vieilli.
C’est encore plus flagrant pour ceux qui comme moi ont vite pris la décision de s’intéresser à ce qui se faisait à côté. On parle souvent des mêmes séries ou jeux, mais si on sort notre nez des Mario, Zelda et autres licences, on tombe sur des milliers de jeux qui ne demandent qu’à être redécouverts. Et c’est à ce moment là, quand on s’intéresse au catalogue de la plupart des machines, qu’on découvre qu’une bonne majorité d’entre eux sont loin d’être extraordinaires. La pépite cachée existe, mais on se plonge fréquemment dans des titres qu’on voulait ardemment en était jeune et qui se révèlent comme des étrons sans grand intérêt.
source photo : retrovideospiele.com
Les arguments qu’on entend pour appuyer le fait que c’était mieux avant, sont souvent semblables. Les jeux modernes sont trop faciles, ils manquent d’originalité, on a tout le temps des suites, et j’en passe des meilleurs. Un constat que personnellement je ne partage pas.
Comme toute industrie, le jeu vidéo est dirigé par l’argent. C’était le cas de nos jours et c’était le cas à l’époque aussi. Alors qu’ils ont quasiment disparus des consoles modernes, les jeux à licences issues du cinéma ou la télévision existent depuis l’ère des 8-bits et même avant, et c’était loin d’être des productions inoubliables. Et on se plaint à notre époque d’avoir chaque année une nouvelle itération de certaines séries. Et bien cela existait déjà.
Dans d’autres situations c’était même encore pire, puisque les éditeurs ont largement profité des différentes zones géographiques et des conditions de distributions, pour parfois ressortir les mêmes jeux, mais avec un enrobage différent. Dans le meilleurs des cas ils prenaient encore la peine de changer les sprites des personnages, mais bien souvent c’est seulement la jaquette du carton qui était retravaillé.
Et est-ce qu’on trouve véritablement plus d’originalité dans le retrogaming ? Si on me pose la question, ma réponse serait non. Car quand je regarde vers le passé, pour un jeu original qui a eu du succès ou qui a apporté une nouvelle idée, je vois tout un tas de clones qui ont tenté de faire la même chose. C’est une évolution normal pour le jeu vidéo, mais en analysant chaque génération on voit que ce sont des cycles qui se répètent tout le temps. Durant les années 90 on avait une émergence de jeu de plateformes, par la suite ce fut des jeux d’aventure en 3D et ensuite les FPS ont été à l’honneur. Dans quinze ans, quand je parlerais avec mon fils de ces jeux de son enfance, il va me parler avec nostalgie des Skylanders et de Fortnite, alors qu’ils ne déclencheront aucun affecte chez moi. Un effet qui au final semble toucher toute les générations de joueurs et qui se répète sans cesse.
Il n’y a pas de réponse universelle pour savoir si c’était mieux avant. Mais la réponse qui fonctionne le mieux pour moi c’est de ne pas séparer le jeu vidéo en deux. Il n’y a pas du vieux et du moderne. Il y a seulement une continuité. Ce loisir suit une évolution qui fait que les jeux que je découvre sur ma Playstation 4 ou ma Nintendo Switch, n’existeraient pas sous cette forme s’il n’y avait pas des jeux qui leur avaient ouvert la voie des années auparavant, en faisant parfois la même chose mais d’une autre manière. Le plus important c’est que je m’amuse et cela peu importe de quelle période provient mon jeu.